Rennes (AAP) - Parce qu'un peuple sans histoires est un monde sans âme, nous poursuivons la vaste rétrospective des grandes batailles ayant marqué nos royaumes. Aujourd'hui, la prise de Rennes.

Or donc, pour que nul n’ignore ce qui advint en la nuit dernière, je mettrai ici par écrit, à la manière dont on conte les faits des guerres et des sièges, ce que rapportèrent messagers certains et gens dignes de foi, revenus de la grande mêlée autour des murs de la capitale bretonne.

Il advint que les osts alliés autour de la Couronne, qui depuis maints jours battaient campagne en ces marches, se portèrent d’un commun mouvement contre l’enseigne de Pilla, capitaine d’un fort et orgueilleux bataillon breton. Là fut livrée une rude escarmouche, où Pilla reçut blessures si mortelles qu’il ne put plus tenir son commandement, et un autre fut mis en sa place pour ne point laisser l’enseigne choir. Ainsi parlent les témoins, qui jurent avoir vu trembler les bannières sous la lune et voler traits et ferrailles jusques aux premières heures.

De plus, il est su et certain que quelques capitaines, White, Mack et messire Maxime, par adresse et fortune, se faufilèrent parmi les défenseurs jusque dedans les murailles mêmes, frappant où ils purent et surprenant ceux qui veillaient moins qu’ils n’eussent dû. Par cette entrée obtenue en la confusion de la nuit (et quelques-unes des gens murmurent qu’il se trouva là quelque ruse ou méprise), leurs troupes se trouvent maintenant en la cité, tandis que plusieurs compagnies amies demeurent encore aux portes, rangées par ordre et attendant qu’on leur ouvre.

On m’a dit que l’ost des Sept Épées, mené par White, est désormais au cœur de la ville ; que les enseignes de Makcimus, de Maxime, de Nannina et de Sorenchristensen y sont aussi logées, tenant places et carrefours. À l’extérieur demeurent les armées d’Urgain, de Trixolas, d’Euphrosyne et de dame Nessia, lesquelles campent au pied des murs, étendards plantés dans la terre humide, sans qu’aucun ne recrute gens nouveaux, car l’heure n’est plus aux préparatifs, mais à l’accomplissement.

Quant au lieu même, il est désormais tenu par les gens de Makcimus, qui en ont pris la garde et le commandement, si bien qu’on peut dire sans forfanterie que la capitale bretonne est tombée, et gît à présent sous la main de ceux qui l’ont conquise à grand bruit de lances et de cottes de maille.

Ainsi fut la prise, et ainsi s’achève le récit de cette nuit, pleine de clameurs et de fortune changeante, dont on parlera encore dans les tavernes comme dans les salles seigneuriales, tant l’événement fut notable et lourd de conséquences. L'heure est aux têtes de choir en bas du billot désormais.

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Jean Froissart pour pour l'AAP agence des terres au Milieu

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