Nancy (AAP) — Il y a dans certains textes fondateurs la solennité des grandes heures. La Lorraine, duché au cœur battant de l’Empire et au souffle fier des vieilles terres franques, s’est dotée, en cette fin de mai de l’an de grâce 1472, d’une nouvelle Loi Fondamentale, digne des chancelleries les plus éclairées du monde des têtes couronnées.

Adopté sans opposition par les pairs du Conseil ducal — huit voix affirmatives, quatre absences, point d’opposition — ce texte au verbe ciselé vient restaurer l’autorité ducale, affirmer l’âme souveraine de la province, et inscrire dans le marbre l’architecture d’un pouvoir stable, organisé, et résolument tourné vers l’ordre et la grandeur.

Car ici, point de pâle imitation des gouvernances modernes. La Lorraine, 95 habitants, réaffirme son essence aristocratique et guerrière, son attachement à la légitimité du sang et de l’élection restreinte. Le Duc — William du Châtelet-Haraucourt, fin lettré et noble de vieille race — y est consacré comme souverain suprême, émanation du suffrage des douze, détenant la grâce, le glaive, la plume et le sceau.

Le pouvoir ducal ne saurait être partagé, mais il est équilibré : par son Conseil, par les chartes, et par la Loi elle-même, devenue la colonne vertébrale du duché. Le tout, dans une hiérarchie subtile où les édits ducaux croisent la Magna Carta et les vieilles coutumes, telles qu’elles se transmettent dans les bibliothèques des grandes familles.

Ce nouvel écrin institutionnel ne sacrifie pas les libertés : il les ordonne. Liberté d’expression, de culte, de circulation, toutes sont gravées dans le texte. Mais point de libertinage ou de licence : tout sujet doit aussi l’impôt, le service d’armes, et la fidélité. La noblesse infidèle, elle, verra ses titres dissous comme brume au soleil du pouvoir ducal.

Les villes — Nancy, Toul, Vaudémont, Épinal — y trouvent reconnaissance et organisation : leurs maires, élus, deviennent des intendants ducale autorité, soumis à l’examen et à la révocation en cas de manquement. La couronne veille — jusque dans les ports de la Moselle et les amphithéâtres de l’université.

Dans ce texte, enfin, souffle une mémoire impériale. Le préambule évoque Charlemagne, et Long John Silver (Jean Long d'Argent ndlr) — figure légendaire dans l’imaginaire lorrain — comme pour mieux inscrire cette réforme dans une généalogie de souverainetés. C’est toute une vision du monde qui y transparaît : une Lorraine fière, enracinée, vigilante, et prête à défendre son unité face aux ambitions extérieures ou aux désordres intérieurs.

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Etienne Berne pour pour l'AAP agence des Terres au Milieu

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