Gemlik (AAP) — Cette histoire commence le 23 décembre 1472. L’Empire ottoman, ce minuscule colosse aux frontières mouvantes, a une fois de plus frôlé l’orage. À l’orée de l’hiver, alors que les vents de Marmara charrient les échos des luttes passées, un soulèvement menaçait de raviver les fractures internes que les sultans s’efforcent de contenir depuis des décennies. De Karesi à Bursa, du port de Gemlik aux plaines d’Anatolie, la rébellion, un instant, crut pouvoir ébranler l’ordre impérial.

Les événements prennent racine dans ces sables mouvants que sont les allégeances ottomanes. Rebelles d’hier, tapis dans l’ombre depuis la chute du sultan Placebo, les insurgés refont surface en décembre 1472. Deux ans d’exil clandestin n’ont fait qu’attiser leur rancœur. En usant des lenteurs bureaucratiques du Karesi Divan, ils s’y infiltrent, se taillant une place au sein des instances locales avant d’armer leurs partisans. Bientôt, deux colonnes se mettent en marche : l’une vers Gemlik, l’autre vers Bandirma, menaçant directement Bursa, pivot du dispositif impérial en Anatolie occidentale.

Que faire face à cette tempête naissante ? Dans les salons feutrés du Conseil impérial, où se croisent vizirs et aghas, les décisions se font attendre. Le Sultan Scarface tergiverse. Laisser les notables de Karesi gérer la situation, au risque d’un embrasement généralisé ? Ou frapper d’emblée, au péril d’une instabilité accrue ? L’Empire est coutumier de ces dilemmes : il lui faut administrer sans étouffer, intégrer sans briser.

Mais tandis que les chancelleries hésitent, une armée veille. Dans l’ombre des palais, loin des intrigues et des calculs, Ragnaros, chef de la Légion d’Acier, prépare déjà la riposte. Son lieutenant Heraa, à la tête d’une flotte légère, quitte Şarköy et met le cap sur Gemlik, pressentant que c’est là que se jouera l’avenir immédiat de la rébellion.

Si les insurgés avaient pris Gemlik, le désastre eût été immense. Son port, essentiel à la flotte ottomane, aurait pu tomber sous contrôle ennemi, fragilisant tout l’équilibre naval en mer de Marmara. Mais la révolte n’était qu’un feu de paille. À Gemlik, les rebelles échouent ; contraints de battre en retraite, ils tentent de se réorganiser à Balıkesir, où ils reprennent le Karesi Divan. Peine perdue : venus de Bursa, d’Edirne et des campagnes environnantes, les régiments ottomans se referment sur eux. L’Empire a cédé un instant, mais il ne pardonne pas. Tous sont passés au fil de l’épée.

L’épisode, clos en quelques semaines, rappelle que l’Empire ottoman, vaste et éclatant, repose sur un équilibre fragile. Comme l’écrit Ragnaros, dans un message adressé aux siens : « Il y aura toujours des hommes prêts à semer la discorde. Notre devoir n’est pas seulement de les anéantir : il est d’aller plus loin. L’Empire ne saurait s’arrêter à ses frontières. La justice doit s’étendre. »

Sous les coupoles de la Sublime Porte, les scribes reprennent leur labeur et les marchands regagnent le Grand Bazar. Mais la leçon est claire : le sultanat, riche de 922 âmes encore, ne pourra jamais se reposer sur ses lauriers. L’Empire, éternel mirage de puissance, n’existe que par la guerre.


Laurens pour l'AAP agence des terres au Milieu.

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